A messeigneurs,
Veu les troubles qui maintenant se représentent, jaye par commandement de sa majesté pourveu en ce pais de pardecha et hors diceluy et donné ordre aux forces que ma semblé estre nécessaires, lesquelles, Dieu mercy, sont sy gaillardes quelles pourront suffir non seulement pour résister et chasser les rebelles avecques leurs adhérens et alliez que de nouveaux sont venus rompre et inquiéter le repos de ces Estatz, ains aussy pour résister à quecconque potentat des circonvoisins qui voulist venir au secours de ses rebelles et faire la guerre an ses Estatz. Les forces qui se sont apprestées sont celles qui sensuivent: en premier lieu, jattens en ung jour huict ou dix, douze à treize mil chevalles estrangiers sans les benddes ordinaieres de ces pais, lesquelles avecques les chevalles legiers quavons, font le nombre, encoires et trois mil chevaulx que seront quinzes mil chevalles. Et pour infanterie, il y a trois régiment dallemant, il y at quarante huict enseignes espaignolz; il y at cent et [mot effacé] denseignes wallons. Et quant à larmee de mer, oultre les naviers de guerre qui estoient icy auparavant, y a celles que sont dernièrement venues dEspaingne, et encor quarantes neufz que de nouveaux sont armées, somma que ce serat ung champe pour faire teste, voiere déchasser quelconque ennemy. Dont vous aye bien voullu advertir affin que puissez entendre que comme les forces sont grandes, conséquamment les fraiz et dépens en seront grands. Sa Majeste pour monstrer laffection et amour quil porte à ses pais de pardecha ma desja pourveu pour commencer à remédier à ces derniers troubles de plus dung milion descus, et vue que pour la deffence de ses Estatz de pardea, il escorches les aultres royalmes et Estatz, vous pouvez jugier, à qui le faict thouche principalement, de combien vous vous debvez efforcer à contribuer gaillardement en chose dont dépent votre conservation.
Jespère de briefs me trouvers avecques les ennemis et, avecques laide de Dieu, donner fin heureuse à ces affaires endedens un mois et demi ou deux, mais scachez que combien lennemy de hors soit vaincu et chassé endedens ledit temps, il vous en demeurera ung aultre aultant griefz qui sont les forces ci-devant déduictes, au cas que vous ne les payez. Car il mengeront, foulleront et destruiront ces pais, lesquelles jusques au temps de paiement demeureront comme en proye. Je vous aye remonstre cy dessus avecques quelle amour et affection Sa Majesté vous a secouru et le fera, quant oires il deuist emploier tout son avoier et Estatz pour la conservation et défence de ces pais, mais la raison requiert que vous qui aves le plus grand intérest , taschez à faiere voz estrèmes debvoiers à contribuer et furnir à sy grande dépence que pour votre bien ne se peult excuser. Voicy Sa Seigneurie, (démonstrant le duc de Medinaceli après de luy), et moy qui luy feray toute assistence, qui emploirons volontiers noz personnes et vyes au service de Dieu, du Roy et conservation de ces pais. Je vous prie messeigneurs de ne mancquer de ce quest de votre debvoier comme bons et loiaulx subjectz et vassaulx de Sa Majesté, ains y mectre la main avecq telle dilligence et zèle que le temps et service de Sa Majesté requiert.
Daprès: Amand Tihon, Analyse et extraits de documents relatifs à lhistoire des Pays-Bas au XVIe siècle, dans: Bulletin de la Commission Royale dHistoire 77 (1908) 37-133, document: 50-52 (Recueil de documents dans les archives de la Cour de justice et commune de Waremme-le-Château, Archives de lÉtat à Liège, fol. 77).